Valéry ouvrit les yeux.
Un flash aveuglant... puis une cristallisation de couleurs vives. Ses membres ne répondirent pas à son appel. Immobile, allongée sur quelque chose - terre ? parquet ? moquette ? -, elle respirait lentement, confuse, sans rien comprendre. Il fallait absolument qu'elle se lève et qu'elle dise à Dean que ses blagues étaient de plus en plus stupides. Mais pour cela, il fallait se mouvoir.
Le pouce, d'abord... voilà... Elle le fit tressauter mais cela ne l'aidait pas. La tête lui tournait. Si elle se levait maintenant, elle allait vomir. Des frissons de fraîcheur semblaient lui parcourir le crâne, avalant par inadvertance ses dernières pensées. Elle resta sans bouger un long moment, même après que ce malaise se fut envolé. Elle se rendormit un instant, sans s'en apercevoir. Mais quand elle se réveilla à nouveau, la lucidité l'envahit et elle réalisa beaucoup de choses en même temps. Elle se leva d'un bond.
Cette chambre n'avait rien à voir avec celle dans laquelle elle s'était endormie la veille. C'était une grande chambre sans fenêtre, avec un joli lit en bois, un parquet propre sans défaut et d'affreux néons en guise de lumière. Mais Valéry ne s'y intéressa pas sur le coup parce qu'elle regardait les murs.
Ils étaient recouverts de tableaux. Totalement, du sol au plafond. Chaque tableau représentait un camaïeu de couleurs sombres : Valéry avait la sensation d'être projetée dans un ciel noir. Mais tous ces tableaux assemblés formaient une oeuvre d'art : cela représentait un cycle de soleil étrange sur des landes désertes. Etrange car, dans cette oeuvre, le soleil se teintait de noir et donnait une lumière bleutée. On voyait chaque étape de la course du soleil : le lever, le passage au zénith où il montait progressivement, puis sa retombée.
Valéry se mordit les lèvres, impressionnée mais aussi dégoûtée par cette oeuvre si morbide. *En tout cas, elle est pas rassurante, cette chambre* songea-t-elle en considérant les néons. *Je reprendrai pas celui qui a fait ça pour la mienne...*
Elle était restée jusque-là plutôt impassible mais soudain, la terreur l'envahit. Elle se trouvait dans une chambre inconnue, sans savoir pourquoi, comment, par qui. Paniquée, elle se tourna vers une porte blanche, couverte de tags à la bombe, qui faisait tache au beau milieu des tableaux noirs raffinés. Valéry s'attendait à ce qu'elle fusse verrouillée, mais à sa grande surprise, elle s'ouvrit sans broncher. Elle sortit...